Statuts de l’association Mémoire des Résistants Juifs de la M.O.I.
Préambule
La recrudescence d’actes et d’injures antisémites et racistes montre à quel point il est urgent de développer l’éducation populaire autour des valeurs fondatrices de la république et des leçons de l’histoire.
C’est un paradoxe d’assister, d’une part, à ces manifestations récurrentes de xénophobie et de haine et de mesurer, d’autre part, l’intérêt de la jeunesse pour les grands moments de fraternité humaine -comme l’a révélé dernièrement le 60ème anniversaire de l’Affiche rouge- et son sens de la justice et sa générosité.
Le devoir de mémoire ne s’impose pas qu’en considération des morts. C’est un devoir des vivants à l’égard des vivants. Il importe au plus haut point de combattre l’obscurantisme facteur d’intolérance. « Culture et savoir, écrivait Paul Nizan, diminuent en tout homme qui les possède la possibilité d’être dupe des mots, d’être crédule aux mensonges ».
« Vi Gott in Frankraych » – « Heureux comme Dieu en France », dit un proverbe yiddish. Savoir comment et pourquoi des étrangers, de nombreux jeunes Juifs, entrèrent dans la lutte clandestine et la lutte armée contre l’occupant nazi ; qui ils étaient ; comment ils étaient arrivés et pourquoi ils avaient fuit leurs pays et choisi la France ; comment ils vivaient et travaillaient ; quels engagements étaient les leurs…ce n’est pas seulement donner un sens à leur sacrifice, c’est nous éclairer sur nous-mêmes.
S’il existe des musées de la Résistance où l’action des FTP-MOI est mis à jour, si le CDJC rassemblent sur leur action documents et études, si de nombreuses publications leur ont été dédiées, il n’existe aucun espace qui soit spécifiquement consacré au rôle de l’immigration dans la Résistance française et singulièrement de l’immigration juive d’Europe centrale.
Il nous paraît indispensable, à la fois au regard de l’histoire et des menaces d’aujourd’hui, d’ ouvrir à Paris un espace, un lieu de mémoire, un musée, qui donnerait à voir comment des immigrés s’approprièrent les valeurs de la République – Liberté, égalité et Fraternité – au moment où elles étaient foulées au pied par l’occupant et bien pire par leurs collaborateurs français.
Cet espace, nous l’imaginons au 14 rue de Paradis, un lieu occupé depuis 1944 par des organisations d’immigrés juifs constituées dans la clandestinité de la Résistance et qui prolongèrent, après la guerre, leur engagement républicain. Cet immeuble est le siège de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) et de la Commission Centrale de l’Enfance (CCE). L’UJRE a été fondé en 1943 avec l’unification de plusieurs groupes juifs de résistance. Elle fut cofondatrice du Crif et ses militantes et militants prirent une part active à la libération de Paris, à celle de Lyon, de Toulouse, de Grenoble et de nombreuses autres villes, ainsi qu’aux luttes armées, politiques et humanitaires de 1940 à 1944. L’UJRE reprit après guerre et pendant plusieurs dizaines d’années l’édition le plus important quotidien yiddish d’Europe : Naïe Presse, fondée en 1934. Son siège et son imprimerie étaient au « 14 » jusqu’à sa disparition. Elle compta parmi les plus grandes plumes du journalisme yiddish. Un autre journal, l’hebdomadaire La Presse Nouvelle magazine, continue d’être publié en français. L’UJRE a mené une vaste activité culturelle et sociale, en coopération très souvent avec des associations juives du monde entier et d’Israël, recevant de grands noms de la littérature, du théâtre juifs de divers pays de l’Est et de l’Ouest. A ses côtés se sont développé des groupes culturels comme la Chorale populaire qui existe toujours. Un dispensaire, « L’Aide médicale » situé au « 14 » lui était lié. Le 14 rue de Paradis hébergea également une troupe théâtrale – le Yidicher Kunst Teater (Y.KU.T), une bibliothèque, des revues littéraires en yiddish, l’Union des Déportés Juifs de France, des sociétés amicales des Juifs originaires de villes de Pologne, de Lituanie et Bessarabie…
Parmi les présidents de l’UJRE, on peut citer le professeur Vladimir Jankelevitch, philosophe de renom, Me André Blumel, longtemps collaborateur de Léon Blum ; Me Charles Lederman, sénateur et Résistant. Nombre d’anciens des FTP-MOI ont pris et prennent encore part aux activités de cette association. Adam Rayski, seul survivant de la direction de la M.O.I était président d’honneur de l’UJRE.
La Commission Centrale de l’Enfance fut fondée pendant l’occupation pour sauver les enfants juifs de la déportation. Plusieurs des femmes qui s’y étaient engagées, périrent en déportation. Les survivantes poursuivirent, après la guerre, une œuvre entièrement dédiée à l’enfance : orphelinats pour les enfants des déportés disparus, centres aérés, colonies de vacances, éducation populaire et solidarité. Aujourd’hui, l’ACCE – Les Amis de la CCE – fondées par d’anciens pupilles et élargies à des militantes et des militants qu’intéressent la culture et les traditions du judaïsme laïque, perpétue le combat de ces femmes, fidèle aux valeurs de la République.
ARTICLE 1
Il est fondé entre les adhérents aux présents statuts une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 16 août 1901, ayant pour titre : « Mémoire des Résistants Juifs de la M.O.I. »
ARTICLE 2
Cette association à pour but :
1) La création au 14 rue de Paradis à Paris, d’un lieu de mémoire dédié aux Résistants juifs de la M.O.I. (Main-d’oeuvre immigrée) en France sous l’occupation nazie, entre 1940 et 1945, ainsi qu’aux activités, après la guerre, de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) et la Commission centrale de l’enfance (CCE), contre la racisme et l’antisémitisme, pour un judaïsme progressiste et les valeurs de la République française.
2) Exposer au public, en France, en Europe et dans le monde, des documents de toute nature se rapportant à l’Histoire de la Résistance juive de la MOI,
3) Mettre à disposition des écoliers, collégiens, lycéens, étudiants, enseignants et chercheurs français et étrangers des documents relatifs à l’Histoire de la Résistance juive pendant la Guerre,
4) Organiser dans un but éducatif, pédagogique et culturel des manifestations de toute nature, ayant trait à la Résistance juive de la MOI.
ARTICLE 3
L’association à son siège social au 14 rue de Paradis 75010 Paris
ARTICLE 4