Appel à parrainages

APPEL POUR PARRAINAGE UN ESPACE DE MÉMOIRE 14 RUE DE PARADIS

Soixante ans après la Victoire sur le nazisme, nous nous devons de pérenniser la mémoire de celles et de ceux qui, en le combattant, se sont battus pour leur idéal de liberté, pour des valeurs d’humanité, pour un avenir dans un monde meilleur. Si nous voulons garder trace de leurs luttes, ce ne peut et ne doit être que pour reprendre le flambeau, pour les mêmes valeurs d’humanité qui nous animent tous.
Le devoir de mémoire ne s’impose pas qu’en considération des morts. C’est un devoir des vivants à l’égard des vivants.
Combattre tout obscurantisme, toute forme d’intolérance est un gage de paix. Si nous voulons faire revivre l’Histoire, l’enseigner et la transmettre, c’est pour que vive dans les consciences et dans les actes, le serment des survivants : “Plus jamais ça !“

Savoir comment et pourquoi des étrangers, de nombreux jeunes Juifs, entrèrent dans la lutte clandestine et la lutte armée contre l’occupant nazi; qui ils étaient; comment ils étaient arrivés et pourquoi ils avaient fui leurs pays et choisi la France; comment ils vivaient et travaillaient; quels engagements étaient les leurs : Il est impératif de donner ainsi un sens à la lutte de ceux qu’on appelait des “étrangers”1. Il existe, certes, des musées de la Résistance où l’action des FTP-MOI est mise à jour, entre autres le Musée de la Résistance Nationale de Champigny. Le CDJC rassemble, certes, documents et études sur la Résistance juive, et les publications abondent, qui lui sont dédiées. Mais aucun espace spécifique ne se consacre encore au rôle de l’immigration dans la Résistance française, et singulièrement de l’immigration juive d’Europe
centrale.

Il nous paraît indispensable, à la fois au regard de l’histoire et des enjeux d’aujourd’hui, d’ouvrir, à Paris, un espace, un lieu de mémoire, qui donnerait à voir comment des immigrés s’approprièrent les valeurs de la République – Liberté, Egalité et Fraternité – au moment où elles étaient foulées au pied par l’occupant et, pis encore, par des collaborateurs français.

Cet espace, nous l’imaginons au 14 rue de Paradis, où vinrent s’installer nombre d’organisations d’immigrés juifs, pour certaines constituées avant-guerre, et qui, dans la clandestinité de la Résistance, puis dès 1944, y prolongèrent, après-guerre, leur engagement républicain.
Vétuste, le 14 rue de Paradis doit être prochainement réhabilité par l’OPAC de Paris. Dans ce cadre, il importe que ce patrimoine de l’histoire et de la culture de Paris, de notoriété universelle, se perpétue. Il le faut pour les survivants et les héritiers directs de cette grande page d’histoire. Il le faut aussi, et peut-être surtout, pour celles et ceux qui, aujourd’hui, refusent la haine, l’antisémitisme et le racisme, et se consacrent aux valeurs de solidarité, de fraternité et de paix.

La M.O.I. (Main d’Oeuvre Immigrée) a été créée avant la seconde guerre mondiale par le Parti Communiste Français pour aider les travailleurs immigrés à s’intégrer et prendre en charge, aux côtés de leurs camarades français, la défese de leurs intérêts. Elle a regroupé sous l’Occupation les résistants d’origine étrangère qui se lancèrent dans l’action armée, à Paris, Lyon, Toulouse, Grenoble et tant d’autres villes. Pensons à ceux de l’Affiche Rouge et du bataillon Carmagnole. La M.O.I. comporta une sous-section juive très active, qui fit paraître un journal clandestin en yiddish Undzer Wort (Notre parole). Elle essuiera de sérieuses pertes et son réseau principal sera démantelé en 1943. Les héros de l’Affiche Rouge seront exécutés au printemps 1944. Mais la Résistance continua par la lutte armée, l’action politique et les activités de solidarité (sauvetage des enfants), à travers des organisations comme l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE), l’Union de la Jeunesse Juive (UJJ) et ses groupes de combats, ou les bataillons FTPF puis FFI.

Depuis la Libération, l’immeuble du 14 rue de Paradis à Paris, a été et demeure le siège de l’UJRE, de sa Commission Centrale de l’Enfance (CCE), puis de l’association Les Amis de la CCE (AACCE). Prenant le relais de Solidarité, l’UJRE a été fondée en 1943 par l’unification de plusieurs groupes juifs de résistance.

Signalons que l’UJRE fut cofondatrice du Crif et de l’Association Nationale Contre le Racisme(ANCR), qui donna naissance au MRAP, et que ses militantes et militants, partout en France, prirent une part active aux combats de la Libération.

L’UJRE poursuivit après guerre et pendant plusieurs dizaines d’années l’édition du plus prestigieux quotidien yiddish d’Europe : la Naïè Pressè, fondée en 1934, dont le siège et l’imprimerie se trouvaient naturellement au 14 rue de Paradis. Ses rédacteurs, souvent des ouvriers, figurent parmi les plus grandes plumes du journalisme yiddish. L’UJRE a également lancé des journaux d’expression française, la Presse Nouvelle Hebdomadaire (PNH) puis la Presse Nouvelle Magazine (PNM).

L’UJRE a aussi mené une vaste activité culturelle et sociale, en coopération très souvent avec des associations juives du monde entier, recevant de grands noms de la littérature, du théâtre juif de divers pays de l’Est et de l’Ouest. A ses côtés se sont développés des groupes culturels comme la Chorale Populaire Juive de Paris. Un dispensaire, L’Aide médicale, situé au “14” lui était lié.
Parmi les Présidents de l’UJRE, on peut citer le philosophe Jankélévitch; l’avocat Me André Blumel,
longtemps collaborateur de Léon Blum; l’ancien résistant Charles Lederman, avocat, sénateur et l’un des principaux organisateurs dans la clandestinité du sauvetage des enfants. Nombre d’anciens des FTP-MOI ont pris et prennent encore part aux activités de cette association. Adam Rayski, seul survivant de la direction de la M.O.I. est le Président d’honneur de l’UJRE.

Pendant l’occupation, des femmes luttèrent avec acharnement, en particulier dans l’Union des Femmes Juives clandestine, pour sauver les enfants juifs de la déportation. Nombreuses furent celles qui périrent, pour ce combat, dans les camps nazis. Comment ne pas évoquer à cette occasion l’immense figure d’une Sophie Schwartz dont on célèbre cette année le centenaire ? A l’initiative de l’UJRE, dans le cadre de sa Commission Centrale de l’Enfance (CCE), les survivants poursuivirent, après-guerre, une oeuvre entièrement dédiée à l’enfance : maisons pour les enfants des déportés disparus, patronages, colonies de vacances, éducation populaire et solidarité. Aujourd’hui, fidèle aux valeurs de la République, l’association Les Amis de la CCE (AACCE), fondée par des anciens de ces foyers, et élargie à celles et ceux que passionnent la culture et les traditions du judaïsme laïque, perpétue leur combat.

Le 14 rue de Paradis hébergea longtemps une troupe théâtrale – le Yiddisher Kunst Théater (Y.KU.T), une bibliothèque, des revues littéraires en yiddish, l’Union des Déportés Juifs de France, l’Amicale des Juifs Résistants (AJAR), des sociétés Amicales de Juifs originaires de villes de Pologne, de Lituanie et Bessarabie… Une intense activité sportive s’y déployait également au travers d’une des salles de gymnastique du YASK2 installée au “14”.

Chargé d’histoire, le “14” est à nos yeux le lieu naturel d’un espace dédié à la résistance des immigrés juifs d’Europe centrale. L’espace consacré au rôle de l’immigration juive dans la Résistance devrait pouvoir développer, en amont et en aval de la seconde guerre mondiale, ce que furent les conditions de cette immigration et de ces immigrés : pays d’origine et causes de leur départ; activités professionnelles; concentrations urbaines; organisations sociales et culturelles, presse; leur rôle dans la guerre d’Espagne; leur engagement dans la Résistance… et la poursuite de l’action civique et culturelle après guerre.

En conclusion, une association Loi 1901 s’est constituée sous le nom de “Mémoire des Résistants Juifs de la M.O.I.” Elle s’adresse aux Pouvoirs Publics pour la réalisation de son objectif : faire du 14 rue de Paradis un espace ouvert qui soit à la fois un lieu de mémoire et un lieu d’éducation populaire, dans l’esprit des valeurs fondamentales de la République.

Elle s’adresse aujourd’hui à vous pour vous inviter vous inviter à parrainer cette initiative. cette initiative.

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